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FRANZ KAFKA

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Message  Casus Belli Dim 30 Mar - 10:47

Dans les récits Die Verwandlung (La Métamorphose)1915 et Der Process1925 de Franz Kafka, le protagoniste est en proie à son entourage, à sa société : ce qui devrait paraître aberrant aux yeux de tous devient ordinaire (une métamorphose inexpliquée, un procès sans cause), et il est tout seul pour démêler son problème. La force des situations oblige l’individu à accepter et normaliser son malheur, sa métamorphose. Puisque les autres s’y accoutument, il se rend à ce qui devient désormais son quotidien. Il intègre le changement avec les autres, mais est seul face à la souffrance qui en découle. Un sentiment de solitude extrême se dégage. Les siens lui sont finalement étrangers. La situation nouvelle est irréversible. Il y a une sensation de surréalisme dans ces histoires, où la métamorphose, le procès, sont vécus comme des injustices. C’est comme un morceau de cauchemar qui s’incruste, se fond dans la réalité. Le protagoniste subi le sentiment de culpabilité, et c’est d’autant plus tragique qu’il n’est pas responsable. Il a le sentiment de payer pour des fautes dont il n’est pas l’auteur. Kafka décrit là des situations où l’individu est coupable devant les autres, mais pas responsable.

- Dans Die Verwandlung : est-ce finalement Grégoire Samsa qui change, ou son entourage ? Dans les nombreuses allégories qui peuvent apparaître au lecteur, on peut y voir : l’écrivain qui reste intègre, quand son entourage se détourne de ce qu’il produit ; l’adolescent qui se sent muer, avoir des idées honteuses, et ne trouve personne à qui les communiquer ; La personne malade que les autres vont voir de moins en moins ; La personne retraitée, etc.
[lire l’entretien de Yannick Haenel]
- Der Process :
* Dans ce roman, les situations sont paradoxales par notre propre volonté :
F. Kafka a écrit:« K. commençait déjà à trouver fatigant qu’on lui reparlât de son innocence à tout instant. Il lui semblait parfois que le peintre faisait de son acquittement la condition d’une collaboration qui devenait inutile par là même. »
p193
Dans cette affaire de justice K. supporte de moins en moins son innocence ; s’il est vraiment innocent, pourquoi en faire tout un cas ?

Autre paradoxe : la Justice, affaire d’intérêts (moraux, pécuniaires), trouve son salut chez ceux dont la fonction est la plus désintéressée (le peintre) :
F. Kafka a écrit:« Il ne voulait pas renoncer à cette aide [celle du peintre], il y était bien décidé ; elle ne lui semblait d’ailleurs pas plus problématique que celle de l’avocat. Il la préférait même de beaucoup à l’autre, car elle s’offrait plus innocemment et plus franchement. »
_p193 On accepte les problèmes avec d’autant plus de volonté qu’elles ne nous concernent pas. L’avocat n’est pas d’une aide si effective, puisqu’elle est intéressée. Alors que celle du peintre est d’autant plus intéressante parce qu’il est supposé, par sa profession, être le genre même désintéressé ; est-ce que l’artiste est un avatar de la Justice ?
F. Kafka a écrit:« Je suis un homme de confiance de la Justice »

* Les preuves matérielles sont un leurre, parce que la Justice n’est pas une question de fait, mais de foi.

* Lorsque K. écoute le peintre, il se comporte comme la Justice devant l’accusé : un instant, il retient son intime conviction pour observer tous les cas de figure
F. Kafka a écrit:« il admettait provisoirement toutes les opinions du peintre, même quand il les trouvait invraisemblables et qu’elles en contredisaient d’autres ; il n’avait pas le temps pour le moment d’examiner ni de réfuter ce qu’on lui disait ; il estimerait avoir atteint tout le possible s’il arrivait à décider le peintre à l’aider de quelque façon que ce fût, même par une intervention dont le succès restât douteux. »
L’essentiel, pour la Justice devant son accusé, n’est pas d’être en accord avec les textes & lois, mais d’être en accord avec les inculpés sur leur sort. Ces révélations étouffent l’esprit qui veut respirer.
F. Kafka a écrit:« Ne pourrait-on pas ouvrir la fenêtre ? »
_p196

* Trois cas de figure : Atermoiement illimité, Acquittement apparent et Acquittement réel

Entre ce que dit la loi, et ce qui est appliqué, il y a tout un jeu de méthode pour défendre sa propre cause, mais il n’y en a qu’une seule qui soit « réelle ». Dans les trois options que présente le peintre, aucune ne représente une Justice qui permet à l’inculpé d’assurer à coup sûr ce que son innocence lui fait attendre, à savoir : l’acquittement réel.

o L’acquittement réel peut avoir lieu, mais c’est un accident très rare. Il n’a à être provoqué que par la seule foi  de l’inculpé – foi qui doit être partagée par l’inculpé avec la Justice. Partant de cette constante, les deux autres solutions ne peuvent que présenter des biais :

o L’acquittement apparent repose sur un jeu de relations, faisant jouer l’officieux au détriment de l’officiel. Il s’agit d’influencer les autres pour qu’ils influencent le Jugement. Cette solution fait encourir le risque pour l’inculpé disculpé d’être inculpé de nouveau.

o L’atermoiement illimité consiste à repousser continuellement le jugement. L’inconvénient, c’est que c’est à perpétuité.

Dans les trois cas, il n’y a un Salut que si les deux parties ménagent leurs scrupules : et pour l’accusé et pour la Justice, si l’un quelconque se rend à ses scrupules, tout recommence à la case départ. Les scrupules concernent la foi en l’innocence. La foi en l’innocence ne peut être exprimée que par l’acquittement réel :
F. Kafka a écrit:« Les deux méthodes [l’acquittement apparent et l’atermoiement illimité] ont ceci de commun qu’elles empêchent la condamnation de l’accusé.
_Mais elles empêchent aussi son acquittement réel, dit K. tout bas comme s’il eût été honteux de l’avoir compris.
_ « Vous avez saisi le fin mot », dit le peintre hâtivement »
Cela m’intime la réflexion suivante : l’accusé condamné qui a la foi en son innocence est comme un Christ sur la croix s'il est condamné

(Le cas de figure n'est pas très éloigné d’une relation amoureuse : juger l’autre à sa juste faute n’est pas chose aisée ; aimer l’autre à sa juste valeur n’est pas chose aisée.
Les trois toiles que le peintre propose à K., par ordre successif, à la fin de l’entretien, représentent les trois situations. Au final, elles ne diffèrent que par la sincérité du regard qu’on porte sur elles. (_p206)
Casus Belli
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